Peut-on faire l’objet d’une interdiction du territoire français ?
L’interdiction du territoire français peut-être prononcée tant à titre de peine principale qu’à titre de peine complémentaire lorsque l'intéressé commet certaines infractions.
Elle peut être prononcée tant en matière criminelle qu'en matière correctionnelle dès lors qu’elle est prévue par la loi.
Or la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 dite pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration a considérablement étendu son champ d’application, de sorte que le juge pénal français y a davantage recours.
Ainsi, selon les dispositions de l'article 131-30 du Code pénal, la peine d'interdiction du territoire français peut être prononcée, à titre définitif ou pour une durée de dix ans au plus, à l'encontre de tout étranger coupable d'un crime, d'un délit puni d'une peine d'emprisonnement d'une durée supérieure ou égale à trois ans ou d'un délit pour lequel la peine d'interdiction du territoire français est prévue par la loi.
L'interdiction du territoire entraîne de plein droit la reconduite du condamné à la frontière, le cas échéant, à l'expiration de sa peine d'emprisonnement ou de réclusion.
La juridiction doit tenir compte de la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français ainsi que de la nature, de l'ancienneté et de l'intensité de ses liens avec la France pour décider de prononcer l'interdiction du territoire français. Une motivation spéciale doit être rendue.
L'interdiction ne peut pas être prononcée dans les cas limitativement énumérés à l'article 131-30-2 du Code pénal à savoir:
1° Un étranger qui justifie par tous moyens résider en France habituellement depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans ;
2° Un étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de vingt ans ;
3° Un étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans et qui, ne vivant pas en état de polygamie, est marié depuis au moins quatre ans avec un ressortissant français ayant conservé la nationalité française, à condition que ce mariage soit antérieur aux faits ayant entraîné sa condamnation et que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage ou, sous les mêmes conditions, avec un ressortissant étranger relevant du 1° ;
4° Un étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans et qui, ne vivant pas en état de polygamie, est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins un an ;
5° Un étranger qui réside en France sous couvert du titre de séjour prévu à l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Ces exceptions ne sont toutefois pas applicables lorsque les faits à l'origine de la condamnation ont été commis à l'encontre du conjoint, d'un ascendant ou des enfants de l'étranger ou de tout enfant sur lequel il exerce l'autorité parentale.
Elles sont également exclues pour les infractions d'atteintes aux intérêts fondamentaux de la nation prévus par les chapitres Ier, II et IV du titre Ier du livre IV et par les articles 413-1 à 413-4,413-10 et 413-11 du Code pénal, ni aux actes de terrorisme prévus par le titre II du livre IV, ni aux infractions en matière de groupes de combat et de mouvements dissous prévues par les articles 431-14 à 431-17, ni aux infractions en matière de fausse monnaie prévues aux articles 442-1 à 442-4, ni aux délits de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une personne déterminée ou un groupe de personnes prévus aux septième et huitième alinéas de l'article 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, ni aux crimes, ni aux délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement, ni aux délits commis en réitération et punis d'au moins trois ans d'emprisonnement.
La chambre criminelle de la Cour de cassation a rappelé que cette interdiction ne peut pas être prononcée dans le cadre d’un sursis probatoire dans la mesure où elle n’est pas légalement prévue par les dispositions de l’article 132-45 du Code pénal (Crim. 31 janvier 2024, n°23-81.704).
L'interdiction ne peut par conséquent pas être prononcée pendant la durée d'exécution de la peine.
Lorsqu’elle a été prononcée à titre de peine complémentaire en matière délictuelle, elle peut être contestée dans le cadre d’un appel ou d’une demande de relèvement adressée au tribunal correctionnel qui a prononcé cette peine sur le fondement des dispositions des articles 702-1 et 703 du Code de procédure pénale ainsi que L.641-2 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Dans la première hypothèse, l’intéressé dispose d’un délai d’appel court de dix jours pour contester cette peine. Dans la seconde, les délais d’examen de la demande de relèvement peuvent s’avérer longs selon la juridiction concernée.
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