L’interpellation d’une personne en préfecture est-elle régulière ?
Dans une affaire récente (Crim. 7 janvier 2025, 23-85.753), la question a été posée à la chambre criminelle de la Cour de cassation de savoir si une personne qui a été interpellée dans les locaux de la préfecture où elle avait été préalablement convoquée, à la demande des enquêteurs, sous un faux prétexte d’examen de sa situation administrative était légal.
Les avocats de l’intéressée avaient soulevé l’irrégularité de cette interpellation au motif qu’elle était déloyale. Ils considéraient ainsi que constitue un stratagème prohibé la convocation sous un prétexte dans une administration publique de la personne dont la comparution est souhaitée afin de l'entendre et constituer des preuves dans le cadre d'une procédure pénale.
Après avoir rappelé que « seul est proscrit le stratagème qui, par un contournement ou un détournement d'une règle de procédure, a pour objet ou pour effet de vicier la recherche de la preuve en portant atteinte à l'un des droits essentiels ou à l'une des garanties fondamentales de la personne suspectée ou poursuivie », la chambre criminelle écarte l’argument de la défense en relevant que la cour d’appel avait constaté qu'il pouvait être craint que l'intéressée ne réponde pas à une convocation de l'officier de police judiciaire.
Elle considère que le moyen, qui se borne à reprocher à la cour d'appel d'avoir jugé régulière son interpellation dans les circonstances précitées sans démontrer ni même alléguer une atteinte à l'un de ses droits, n'est pas fondé.
Cette solution s’inscrit dans une jurisprudence stricte et souvent contestable s’agissant de l’obligation de loyauté dans l’administration de la preuve qui pèse sur les enquêteurs et qui résulte des dispositions de l’article 427 du Code de procédure pénale.
Or le respect de cette obligation de loyauté est non seulement la condition d’exercice des droits de la défense mais également celle de la conduite du procès équitable.
Il est ainsi prohibé toute machination, artifice et stratagème dans la recherche et l’administration de la preuve par l’autorité publique (Cass. Ass. Plénière, 9 décembre 2019, n°18-86.767).
Cette position restrictive et de principe remonte à 1996 où il a été affirmé le principe selon lequel n’est pas admissible une preuve procédant d’une « machination de nature à déterminer (l)es agissements délictueux et que, par ce stratagème, qui a vicié la recherche et l’établissement de la vérité, il a été porté atteinte au principe de la loyauté des preuves » (Crim. arrêt dit Schuller en date du 27 février 1996).
En l’espèce, la position des juges de la Haute Cour nous semble particulièrement contestable dès lors qu’il était question à notre sens du recours par les enquêteurs à un procédé déloyal visant à contourner le cadre juridique normalement applicable à la poursuite des infractions (Cass. Ass. plénière, 9 décembre 2019, n°18-86.767, précité). Il était bien question de ne pas l’interpeller selon les règles applicables par le Code de procédure pénale et bien d’établir une ruse destinée à le faire comparaitre pour un autre motif non directement visé par le Code.
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